C’est impuissante que j’avais entendu mon portable sonner dans la chambre alors que j’étais en train de sortir de la douche. Tu parles, le temps que passe une serviette autour de moi pour aller le chercher, ça avait déjà raccroché. Parce qu’il avait bien sûr fallu que mon meilleur ami choisisse ce moment précis pour me téléphoner… en voyant qu’il avait laissé un message, j’avais eu un espoir… mais non, rien, il voulait juste que je le rejoigne.

Je ne l’avais pas vu de la journée, ce qui n’arrivait jamais. C’était même à peine s’il m’avait adressé la parole ce matin, il avait été pressé de partir et depuis… niet. Rien du tout. Du coup j’avais carrément passé la journée toute seule, j’avais envie de voir personne. Ma mère m’avait appelé, heureusement, j’avais entendu mon beau-père et mon petit ange de petit frère me souhaiter un joyeux anniversaire. S’ils n’avaient pas téléphoné, je ne sais pas ce que j’aurais fait. Si même mon meilleur ami m’oubliait, je n’avais plus d’espoir à avoir.

Malgré que je lui en veuille, je ne pouvais pas l’ignorer alors qu’il avait besoin de moi. Je me demandais cependant ce qu’il foutait à Lu Xun à cette heure. Mais je ne le saurais pas en échafaudant des histoires idiotes dans ma caboche. Je m’étais habillée en deux-deux, maquillée légèrement, et j’avais séché mes cheveux un minimum avant de les attacher… me promettant de tuer Zhen Juan si mes cheveux prenaient le pli de ma queue-de-cheval.

Je partis un petit quart d’heure après avoir reçu son message, je pris donc ma voiture pour m’y rendre plus vite. Heureusement que j’avais une conduite sportive, parce que le parc Lu Xun c’était pas la porte à côté hein ! Eh puis quelle idée de me faire sortir alors que j’avais juste envie de me pelotonner dans mon lit… et c’était de sa faute en plus !! Si j’avais su qu’il m’ignorerait toute la journée, je n’aurais pas hésité à lui faire remarquer son oubli ce matin, j’aurais peut-être passé une meilleure journée… ah, l’anniversaire de mes 19 ans, je m’en rappellerais.

Arrêtée à un feu rouge, je décidai d’envoyer rapidement un texto à Zhen Juan pour le prévenir que j’allais arriver. Cinq minutes plus tard, je me garai sur un parking à proximité du parc, j’attrapai mon sac à main et sortis pour rejoindre Zhen Juan. Je filai jusqu’à la fontaine en courant sur mes talons de cinq centimètres… a pas peur, cinq centimètres c’était reposant pour moi. Je sentis néanmoins quelques regards sur moi, je dus prendre sur moi pour m’empêcher de m’arrêter et leur dire ce que je pensais.

Je trouvai finalement Zhen Juan, assis sur le bord de la fontaine. Je m’arrêtai devant lui et appuyai mes mains sur mes cuisses pour reprendre mon souffle. J’étais pourtant sportive - ouais, autant que ma conduite en voiture ! - mais je pense que j’avais un peu eu peur en fait.

« Désolée de t’avoir fait attendre ! »

Ah ! Mais écoutez-moi ça ! D’où je m’excusais, c’était quoi mon problème !? Je n’avais absolument rien à me reprocher moi ! Je n’aimais pas quand je faisais ça, prendre les torts pour moi… et bizarrement, je ne le faisais qu’avec lui…
Je me redressai finalement et regardai mon meilleur ami.

« Qu’est-ce qui se passe ? Qu’est-ce que tu fais ici ? »

Il avait bien intérêt à ce que son urgence soit vraiment urgente, s’il ne voulait pas que je le frappe encore. Et, malgré tout, je n’avais pu empêcher mon esprit de divaguer pendant que je conduisais, et je sortis la première chose qui me vint.

« T’étais avec ta copine ? Haha ! »

Haha ! Hah. Ha… Pour être dans un endroit pareil, l’idée qu’il y ait une fille dans les parages n’était pas si idiote hein ! C’était possible quand même !

Bah oui, pour une raison qui m’était inconnue je m’étais imaginé qu’il aurait pu vouloir me présenter à sa petite amie, j’étais sa meilleure amie, ça aurait pu être possible… mais il ne m’aurait pas dit que c’était urgent… alors ça devait s’être mal passé… on était proches tous les deux, elle aurait pu ne pas aimer ça et vouloir qu’il coupe les ponts avec moi… voilà, c’était ça ! Il voulait plus de moi comme meilleure amie !
Il n’y a pas à dire, je partais très vite dans des raisonnements tordus… et quand il s’agissait de Zhen Juan c’était encore pire. Mais c’était de sa faute, il m’avait oublié aujourd’hui, alors j’avais peur qu’il commence à se désintéresser de moi. Ce que je comprendrais, depuis le temps qu’on se connaissait… Et puis cet appel alarmé n’avait pas aidé à me calmer.

Il se leva finalement et s’avança vers moi, une seconde après je me retrouvai dans ses bras. Je me figeai, une seconde, surprise par son geste pourtant courant entre nous. Je posai doucement ma tête contre son épaule alors que les battements de mon cœur s’affolaient. Je n’avais plus envie de penser à rien, et je lui en voulais presque plus. Je me sentais toujours incroyablement apaisée dans ses bras… mais ce soir, je crois que son oubli me bouleversait réellement.

« Happy Birthday », murmura-t-il à mon oreille.

Ah ! Il se recula juste pour me regarder, et il me sourit tendrement. Il me lâcha finalement et je le regardai, bêtement, alors qu’il cherchait quelque chose dans ses poches. Il n’avait pas oublié alors ? Il sortit une boite de sa poche et me la tendit.

« Je n’ai pas oublié quel jour on est. »

Comme je ne bougeai pas, il prit ma main pour y mettre la boite et il me rapprocha de lui pour déposer un baiser sur mon front. Je ne pus m’empêcher de sourire, une seconde, soulagée de faire toujours partie de ses priorités. Mais il n’allait pas s’en tirer comme ça… parce que j’étais tellement émue que je sentais mon amertume de la journée reprendre ses droits et les larmes me montèrent aux yeux.

« Abruti ! Pourquoi tu m’as évité toute la journée !? J’ai vraiment cru que tu m’avais oublié ! »

Il savait pourtant avec quel talent j’arrivais à me mettre les pensées les plus idiotes en tête… mais il continuait à provoquer tous ces tourments en moi comme si de rien n’était, comme si j’étais capable de me contrôler... Il me connaissait quand même mieux que ça, non ?
Je baissai la tête pour cacher mes larmes. J’étais bête de lui en vouloir alors qu’il m’avait fait pensé à moi finalement, et qu’il m’avait même acheté quelque chose… mais je n’avais, pour l’instant, pas la tête à regarder de quoi il s’agissait. Je me rapprochai de lui et posai ma tête contre son torse, me retenant de toutes mes forces de me blottir contre lui.

« Ne fais plus jamais ça, s’il te plait… »

Je reniflai doucement et fermai les yeux. Heureusement qu’il n’y avait personne autour, parce qu’il n’y avait que Zhen Juan pour comprendre que je pouvais lui crier dessus et aller me faire caliner ensuite.

Je commençais à me sentir mieux, là, tout près de mon meilleur ami. Il n’attendit pas longtemps pour passer ses bras autour de moi et me serrer contre son torse, je soupirai tout doucement. Ce qu’il pouvait être idiot quand même, comment ne pouvait-il pas comprendre qu’à chaque fois il me faisait perdre les pédales très facilement. J’étais trop à fleur de peau quand il s’agissait de lui, mes sentiments me brûlaient toujours et j’avais chaque jour un peu plus peur que ça s’arrête tout à coup. Je me l’avouais de temps en temps plus facilement qu’à d’autres moment, j’éprouvais plus qu’une simple amitié pour Zhen Juan, et c’était quelque chose que nous ne nous étions jamais dit… pourtant nous avions l’habitude d’être franc l’un envers l’autre, mais ce simple non-dit avait le don de m’angoisser par moment.

- Je suis désolé, je ne voulais pas que tu crois que je t’ai oublié. Mais ton cadeau n’était pas prêt et je voulais te donné ton cadeau en même temps.

Je me frappai mentalement, j’aurais dû y penser, c’était son genre de faire ça, et en fait il m’avait déjà une fois ou deux fait le coup parce qu’il n’avait pas de cadeau… mais il n’attendait en général pas la journée entière pour rectifier le tir.
Je le tapai doucement en le traitant une fois encore d’abruti. C’était ce qu’il était ! Ni plus ni moins ! Comme si le plus important était les présents que je pouvais recevoir le jour de mon anniversaire… qu’on pense à moi me suffisait toujours.

Après quelques instants, Zhen Juan s’écarta de moi, il prit néanmoins ma main et m’attira jusqu’à la fontaine où il me fit asseoir alors qu’il faisait de même.

- Allez ouvre ton cadeau maintenant et j’espère vraiment qu’il te fera plaisir.

C’était presque amusant de voir qu’il craignait toujours que je n’aime pas ce qu’il m’offrait alors qu’il trouvait toujours ce qui me faisait plaisir, il me connaissait bien mieux que ce qu’il pensait.
Je hochai doucement la tête et pris la boite entre mes mains pour l’ouvrir. Je découvrir un petit bracelet en argent, je souris et l’attrapai entre mes doigts avant de poser la boite sur mes jambes, pour mieux observer le bijou. Je le tournai doucement et aperçus une gravure, je lus et me figeai. Il s’agissait de la date de la première fois où nous nous étions réellement parlé. La date du jour où j’avais dû le défendre alors qu’il avait lui-même essayé de me défendre. Je ris à ce souvenir mais je sentis une larme rouler sur ma joue.
Moi, je n’avais pas oublié, mais j’étais une fille, c’était le genre de chose qui était importante pour nous… mais les garçons ne s’attachaient pas à ces détails en général. Il se souvenait de la date exacte.

« Il est magnifique, Zhen Juan… »

Je relevai les yeux vers mon meilleur ami et lui souris avant de passer mes bras autour de son cou pour lui faire un câlin. Je me pressai contre lui, j’espérais qu’il sentirait les battements affolés de mon cœur.

« Merci beaucoup… »

Je me reculai à peine et déposai un baiser sur sa joue.

Je le regardai en souriant. Près de lui j’avais toujours envie de sourire, enfin sauf quand il me laissait penser qu’il m’avait oublié évidemment… c’était un idiot. Mais je l’aimais. Et les mots me brûlaient les lèvres sans arriver à sortir, c’était frustrant.
Il me lâcha le premier et attrapa précautionneusement le bracelet pour le passer à mon poignet.

- Je suis content qu’il te plaise. Je voulais vraiment que ce soit un cadeau spécial.

Je relevai les yeux vers lui. « Spécial »… je sentais qu’il voulait me faire passer un message en disant ça, malheureusement, quelque chose dans ma tête faisait barrage et je décidai de ne pas m’attarder sur cette phrase. Pourquoi avais-je peur de me faire de faux espoirs ? C’était mon meilleur ami, plus que ça même, alors pourquoi je faisais un blocage ?
Je baissai les yeux sur le bracelet et le caressai du bout des doigts, je savais déjà qu’il ne me quitterait jamais, ce bracelet. Parfois j’avais l’impression que Zhen Juan me connaissait tellement bien que c’était comme s’il avait la capacité de lire dans mes pensées. Ça aurait été tellement plus simple s’il pouvait.

- Maintenant tu veux faire quoi ? Je suis à ta disposition pour le temps qu’il reste de ton anniversaire. Et il n’y a aucune limite.

Je le regardai et souris. J’aurais bien aimé être assez garce pour me venger en lui faisait acheter plein de choses inutiles, ouais pile à cet instant, ça aurait été trop drôle. Mais je ne savais pas vraiment ce que j’avais envie de faire là, seulement me poser avec lui et rester dans ses bras… sauf que je pouvais pas le lui dire en vrai.
Je réfléchis donc à toute vitesse pour trouver quelque chose d’intéressant à faire, dans un endroit calme.

« Hum… on pourrait aller au cinéma, non ? Ça fait un bail que je n’ai pas pu y aller. »

J’étais une élève sérieuse, alors je me consacrais à mes études, et à mon combats contre les élitistes et le High Five, alors le cinéma était un loisir que je ne pratiquais qu’occasionnellement.
Malheureusement quelqu’un sembla contre cette idée, mon ventre se manifesta pour me le faire savoir.

« Mais on pourrait aller manger un morceau avant » ajoutai-je en pouffant de rire. « Je crois que si je ne mange pas, mon ventre ne va pas nous laisser tranquille. »

Je rigolais, mais en fait je crois que je n’avais pas mangé de la journée… ou ça m’était sorti de la tête. Ça m’arrivait pas souvent de ne pas manger… en fait, ça m’arrivait que quand j’angoissais. Combien de repas avais-je sauté quand ma mère était enceinte ? Et après, quand elle n’était pas en mesure de se lever de son lit ? Plus d’un… et même plusieurs de suite parfois. J’avais promis à Zhen Juan que ça ne m’arriverait plus, parce qu’évidemment il l’avait su… mais je n’avais même pas eu faim de la journée… rah j’étais pas désespérée à ce point quand même !

A ma demande, il se mit à rire, j’en déduisis que de toute manière lui aussi devait avoir faim. Enfin, tant qu’il ne se rendait pas compte que, moi, je n’avais pas mangé depuis vingt-quatre heures, c’était parfait, il ne me ferait pas de remontrances.
Il se releva et me tendit sa main que je m’empressai de prendre, le cœur battant. Je me levai à mon tour et on commença à avancer silencieusement dans les allées du parc. Du moins, pour moi, ce n’était pas silencieux, j’avais l’impression que les battements de mon cœur recouvraient tous les autres bruits et que Zhen Juan allait finir par les entendre lui aussi.

- Je vais tâcher de trouver un endroit assez digne de toi.

Eh ? Je relevai les yeux vers lui alors qu’il souriait. Digne de moi ? Qu’est-ce que c’était cette histoire encore ? Personnellement je me fichais un peu de l’endroit où je mangeais, et il me semblait ne jamais avoir fait mine de refuser un endroit « indigne de ma personne », je n’étais pas comme ces poules qui peuplaient l’université, tout m’allait tant que les gens étaient agréables et la nourriture mangeable.

- Absolument un restaurant ou peu importe ? Car j’ai vu un stand tantôt et ça semblait excellent.

Je soupirai doucement, étonnée qu’il me le demande cela dit. Est-ce qu’il pouvait encore avoir des doutes sur ce que je pouvais vouloir ? Même si c’était mon anniversaire, je ne voulais pas qu’il me traite différemment de d’habitude. Je n’étais pas plus précieuse, pas plus important, ni plus fragile.

« Évidemment que je m’en fiche. Si ce stand de tente, alors il me tente aussi, je te fais confiance. »

Nous avions des goûts assez similaires, alors je savais que je pouvais lui faire confiance pour à peu près n’importe quoi… et notamment pour la nourriture, Zhen Juan avait toujours été riche et bien nourri, je ne le pensais pas aussi capable que moi d’avaler quelque chose juste par besoin de manger. Ce n’était pas un reproche, c’était la vérité, donc je n’avais rien à craindre.
Et puis je ne voulais pas qu’il se mette à penser qu’il devait me traiter comme ces poufs de l’université voulaient être traitées, je détestais ça… c’était trop bizarre.

« De toute façon, si on veut aller au cinéma il vaut mieux pouvoir manger rapidement, au risque de rater toutes les séances. »

Et je savais que s’il m’avait proposé « restaurant », ce serait un vrai restaurant, donc le genre où on doit prévoir une soirée complète sans rien prévoir après vu le temps qu’il faut pour être servi. Mais là, pour le coup, manger n’était pas le programme de la soirée, j’avais envie de me distraire un peu, pour m’ôter de la tête toutes les pensées qui avaient pu germer dedans aujourd’hui, et les cours, et les conflits…

Après quelques instants à réfléchir encore à ses paroles, je me plaçai devant lui pour qu’il s’arrête et je le regardai droit dans les yeux… putain pourquoi j’avais pris des talons si petits, j’étais plus de taille face à lui là, je me sentais naine…

« Zhen Juan… Tu sais, je n’ai pas besoin que tu sois prévenant de cette manière avec moi. Je n’ai rien de bien spécial si ce n’est mon caractère, alors je ne veux pas que tu dises des choses comme ‘un endroit digne de toi’. Tant que je suis avec toi… je me fiche du reste… »

Je baissai la tête en sentant mes joues rougir. Ce n’était peut-être pas très explicite comme manière de lui exprimer ce que je ressentais, mais c’était le maximum que je pouvais faire. Jamais je n’avais réussi à le lui dire d’une autre façon que d’y laisser une part de doute qui lui fasse penser que je pouvais ne parler que de notre amitié, et pas de plus que ça.

Bon, il allait falloir que j’arrive à calmer mon pauvre petit cœur car s’il se mettait à battre si fort pour des déclarations aussi faiblarde, je ne serais probablement pas loin de la crise cardiaque si je trouve un jour le courage de lui avouer sincèrement ce que je ressentais pour lui.

Doucement, je sentis sa main se glisser sous mon menton et il releva mon visage vers lui, je le regardai alors qu’il plongeait ses yeux dans les miens, se rapprochant un peu plus de moi. Surprise par ce soudain rapprochement, ma respiration se stoppa quelque peu.

- Pour moi tu es spéciale Xue Feng… à mes yeux il est dur de trouver quelque chose qui soit digne de toi.

Sans me laisser le temps de réagir, il m’embrassa. Je me figeai, bien incapable de faire le moindre mouvement, pas même pour répondre à ce délicieux baiser. Est-ce que j’étais en train de rêver, ou est-ce qu’il m’embrassait vraiment ? Mon meilleur ami que j’aimais depuis tout ce temps, il faisait enfin ce que j’avais peur de faire la première. J’étais juste en train de me reprendre quand il rompit le baiser et s’écarta pour passer une main sur son visage.

- Je suis désolé Xue Feng.

Je soupirai doucement en secouant la tête. Pourquoi pensait-il nécessaire de s’excuser pour ce qu’il venait de faire ? J’étais tellement heureuse, là, à cet instant, pourquoi est-ce qu’il s’en excusait ?
J’attrapai sa main pour qu’il l’enlève de son visage et le regardai une seconde, lui adressant un petit sourire incertain.

« Ne t’excuse que si tu regrettes… »

Je baissai les yeux. Moi je ne regrettais pas qu’il l’ait fait, mais là je dois dire que je commençais à avoir peur. D’accord, je crois que nous nous étions plus d’une fois prouvé notre affection, sans nous le dire avec les mots qui convenaient, mais peut-être au fond le savions-nous déjà.
Mais nous étions amis depuis si longtemps… j’avais tout de suite accepté mes sentiments pour lui, parce que ça me paraissait tellement naturel, mais ça ne m’avait pas empêché d’hésiter quelques fois, de douter, est-ce que nous avions envie de mettre en péril notre solide et profonde amitié pour un amour qui pourrait se révéler instable ? Moi oui. J’y avais longuement pensé, je connaissais mon meilleur ami par cœur et il était la personne que j’aimais le plus au monde. Alors je ne craignais rien, notre lien ne se briserait jamais… mais Zhen Juan n’en était peut-être pas aussi sûr que moi après tout.

« Est-ce que tu regrettes ? »

Je le regardai de nouveau, prête à affronter sa réponse… mais avant tout, j’étais prête à lui dire ce que je ressentais.

« Moi je ne regrette pas. Je… depuis longtemps j’espère que ça arrive… »

De nouveau, je me sentis rougir, mais je ne détournai pas les yeux. Encore une fois, oui, j’avais esquivé, mais une partie de moi me disait que je devais attendre d’être absolument sûre de ses sentiments pour lui dire les miens. Enfin, cette partie de moi, c’était les paroles de ma mère qui revenaient en fait… elle savait bien que j’aimais Zhen Juan, et elle savait que notre amitié comptait plus que tout pour moi, elle m’avait conseillé de ne pas me précipiter… et ma mère avait toujours raison.

Je dois bien avouer que j’avais peur de sa réaction face à ce que je venais de lui dire. Je connaissais assez bien Zhen Juan, certes, mais après tout je ne savais pas comment il agissait avec les filles en général, si ça trouve il allait me prendre pour une débile pour avoir dit quelque chose de si niais… moi aussi je me sentais un peu débile, mais je me sentais bien aussi, d’avoir pu le lui dire en face.
Il posa doucement sa main sur ma joue et me regarda dans les yeux.

« Non je ne regrette pas… je ne pourrais pas regretter ça… »

Mon cœur s’accéléra et je souris. J’étais rassurée par ses paroles, oui encore une fois j’avais réussi à me faire peur toute seule. Je devrais sans doute apprendre à faire plus confiance à ce que je ressentais, je savais que je le connaissais parfaitement après tout, pourquoi est-ce que j’avais encore peur de me faire des faux espoirs… Zhen Juan ne m’avait jamais déçu, il avait toujours été à la hauteur, il avait toujours été parfait avec moi.
Il déposa un baiser sur mon front, je fermai les yeux une seconde pour profiter des tressauts de mon cœur.

« Depuis le temps que j’avais envie de faire ça. J’ai enfin pris mon courage à deux mains et je l’ai fait. »

Mon sourire s’agrandit alors que je le regardais de nouveau. J’étais bienheureuse qu’il se soit décidé, qu’il ait trouvé du courage quand j’hésitais encore. Non, moi jamais je n’aurais pu faire le premier pas, quand bien même je n’étais pas timide, avec Zhen Juan… avec lui c’était toujours différent, il y a des fois où je n’arrivais même plus à me comporter normalement.
Puis il serra contre son torse un instant, avant d’attraper tendrement ma main en se remettant à marcher.

« Allez allons manger. »

Je hochai la tête sans cesser de sourire et resserrai doucement mes doigts sur les siens en me rapprochant un peu de lui. Je baissai les yeux vers nos mains, et mon poignet orné du bracelet qu’il venait de m’offrir. Peut-être allions-nous pouvoir ajouter une nouvelle date importante à notre histoire…